La combustion du bois dégage dans l’atmosphère une quantité de CO2 égale à celle que les arbres ont extraite de l’atmosphère au cours de leur croissance. Le chauffage au bois est donc neutre à cet égard, abstraction faite des émanations causées par la collecte, le transport et le traitement du bois. Le bois-énergie provient, d’une part, de la forêt (assortiments de moindre qualité, restes d’abattage) et, d’autre part, du bois résiduel de scieries, de vieux bois ainsi que de bois résultant de l’entretien du paysage.

Gagnants et perdants

Une utilisation accrue du bois-énergie dans la forêt aide non seulement à lutter contre le réchauffement climatique, mais il contribue aussi au maintien de la diversité spécifique. Les espèces héliophiles et thermophiles bénéficient à court et à moyen terme de l’évolution des conditions de vie après l’abattage du bois. C’est d’autant plus important que les forêts suisses se sont densifiées et assombries au cours des dernières décennies.

L’intensification de l’exploitation du bois-énergie en forêt présente aussi néanmoins des incidences négatives. Peuvent notamment en souffrir les espèces tributaires de vieux arbres, de forêts en phase de sénescence et de bois mort épais. Bon nombre de ces espèces sont aujourd’hui menacées, car leur habitat est souvent insuffisant dans les forêts exploitées.

Comment évolue la quantité de bois mort?

Durant les dernières décennies, les volumes de bois mort ont fortement augmenté à l’échelle nationale, notamment à la suite des deux ouragans Viviane (1990) et Lothar (1999), et en raison du manque de rentabilité de la collecte de bois dans les zones difficilement accessibles. En même temps, la conscience de la population et des exploitants par rapport à l’importance écologique du bois mort s’est accrue. Cette évolution est réjouissante, mais les volumes de bois mort de la forêt suisse menacent de décroître encore durant les prochaines décennies, si l’augmentation de la demande en bois-énergie entraîne une exploitation plus intensive de cette ressource.

La principale raison d’un recul futur du bois mort pourrait résider dans la récolte de l’arbre entier. Dans ce cas, non seulement le bois de grumes est retiré de la forêt, mais aussi la couronne. Après ce type d’abattage, le bois résiduel est pratiquement inexistant. En outre, de plus en plus de bois de mauvaise qualité est récolté, qui restait autrefois dans la forêt. C’est le cas par exemple des arbres-habitats, dotés de précieuses cavités.

Si l’exploitation du bois énergie est plus rentable à l’avenir, des peuplements devraient bientôt être récoltés, qui n’étaient plus exploités depuis plusieurs décennies et donc présentaient un volume de bois mort analogue à celui de forêts naturelles ou primitives. Pour la même raison, il serait plus difficile d’aménager des réserves forestières et des îlots de bois mort ou de renouveler les contrats y afférents à leur échéance.

Coléoptères dans les dépôts de bois-énergie

Le bois-énergie de la forêt est principalement collecté en automne et en hiver. Les dépôts de bois (figure 1) restent durant l’été dans la forêt pour sécher. Ces dépôts attirent les coléoptères lignicoles, qui y trouvent des sites propices à la ponte de leurs oeufs (figure 2). Comme le bois ne tardera pas à être déchiqueté, les larves de la plupart des espèces ne parviendront pas au terme de leur développement, ce qui peut provoquer le recul des effectifs de leur population jusqu’à l’extinction locale d’une espèce. L’impact de ces «pièges écologiques» sur les coléoptères lignicoles et en cours d’étude à l'Institut fédéral de recherches WSL (figure 3).

Faire l'un sans négliger l'autre

Tant la sauvegarde de la biodiversité que la réduction des émissions de CO2 sont indispensables à un développement durable. Le principal défi consiste à prendre en considération, malgré le regain d’exploitation du bois énergie, les exigences des espèces tributaires de vieux arbres et de bois mort. La résolution de ce dilemme exige l’engagement de tous.

La recherche doit fournir des bases pour que des mesures adéquates puissent être développées conjointement avec les services forestiers et les praticiens. Cela concerne par exemple la situation des tas de bois énergie, les arbres-habitats ou les restes d’abattage (rémanents de coupe). Il ne sera possible d’obtenir un équilibre entre l’exploitation de l’énergie du bois et la biodiversité que si tous les acteurs conjuguent leurs efforts.