Des troncs morts sur pied ou des branches mortes menaçant de tomber à tout moment représentent un danger sérieux. Le bois mort à terre est beaucoup moins dangereux, mais son accumulation à terre peut rendre le travail des forestiers moins sûr et augmenter ainsi indirectement les risques, notamment ceux dus aux trébuchements et aux chutes. De plus, les chandelles qui se renversent peuvent causer des dégâts matériels.

Le danger est souvent méconnu

L'expérience montre malheureusement que les mandants aussi bien que les forestiers qui exécutent les travaux sous-estiment fréquemment les dangers liés au bois mort. Les deux exemples suivants démontrent quelles conséquences fatales peuvent en découler. Le deuxième illustre particulièrement comment des accidents dus à une approche non professionnelle par rapport à la présence de bois mort peuvent survenir de façon inattendue.

  • Cas no 1: Un forestier-bûcheron abattit un épicéa vert, qui dans sa chute effleura un arbre desséché, le cassant à une hauteur d'environ douze mètres. La partie du tronc mort ainsi projetée au loin heurta le bûcheron, le blessant mortellement.
  • Cas no 2 : Pour des raisons écologiques et économiques, le contrat de travail stipulait que seuls des arbres sains pouvaient être abattus à l’intérieur du peuplement. L'entreprise forestière mandatée devait laisser le bois mort sur pied. Le bois coupé était transporté par hélicoptère. Quand l’hélicoptère revint avec les sangles de transport, un des employés rencontra des difficultés à détacher les sangles du crochet d'arrimage. Un deuxième ouvrier ainsi qu’un bûcheron accoururent pour l’aider. Alors que tous trois étaient occupés à défaire le matériel de transport, il y eut un grand fracas. Le forestier-bûcheron put se mettre à l'abri mais les deux aides furent heurtés par la chute d’un tronc. Le déplacement d'air provoqué par les pales de l’hélicoptère avait provoqué la chute d’un pin mort.

L'enquête révéla dans les deux cas que ni l’employeur ni les collaborateurs sur place n’avaient été conscients des dangers inhérents à la présence de bois mort.

La responsabilité de l’employeur

La directive, édictée par la Commission fédérale de coordination pour la sécurité au travail (CFST 2007), relative à l’appel à des médecins du travail et autres spécialistes de la sécurité du travail (Directive MSST), stipule : "Dans le cadre de leurs obligations générales (art. 3 à 10 OPA1 et art. 3 à 9 OLT 32), tous les employeurs identifient les dangers présents dans leur entreprise pour la sécurité et la santé des travailleurs et prennent les mesures de protection et les dispositions nécessaires selon les règles reconnues de la technique. L'employeur est tenu de vérifier régulièrement les mesures et les dispositifs mis en place, en particulier lors de changements opérationnels."

Gestion du bois mort en matière de sécurité

Pour réduire les risques inhérents au bois mort, il faut prendre des mesures de sécurité supplémentaires, débordant du cadre normal de la récolte du bois. Les indications suivantes ne sont pas exhaustives. Par exemple, elles ne mentionnent pas le manque de visibilité dans les couronnes lors de travaux forestiers effectués en été. De plus, les mesures définies ici sont absentes des outils d’aide pratique édités par la Suva.

Mesures à prendre pendant la planification

C’est en particulier dans le cadre de projets visant la protection de la nature que le bois mort est laissé sur pied ou au sol. Quelques-unes des mesures énumérées ci-dessous doivent déjà être prises en considération au moment de la planification de tels projets. Ainsi, il est important que non seulement les ouvriers forestiers qui exécutent les travaux soient conscients des risques mais également les mandants, qui sont souvent actifs au sein des administrations cantonales ou des organisations de protection de la nature.

  • Le bois mort sur pied, dont les risques potentiels sont les plus élevés pour le personnel forestier sur un chantier d’abattage, devrait être si possible mis à l’écart sous forme d’îlots de bois mort, ou d’îlots mixtes de sénescence et de bois mort, et signalé comme tel (fig. 1). Des troncs morts sur pied dispersés au sein de peuplements forestiers exploités sont beaucoup plus dangereux que des îlots de sénescence et de bois mort clairement délimités.
  • A proximité immédiate de routes et de chemins, aucun tronc mort ne devrait être laissé sur pied. La distance de sécurité doit être suffisante pour qu'en cas de chute, les troncs morts ne puissent pas tomber sur la voie publique.
  • Les travaux de bûcheronnage sont particulièrement délicats le long des lignes électriques. Ils ne devraient pas être entravés par du bois mort sur pied ou au sol.
  • Les travaux de bûcheronnage dans des peuplements riches en bois mort demandent davantage de temps et de moyens financiers. Des ressources supplémentaires doivent être prises en considération dans tout projet. Là où la pression économique est trop forte, les dangers sont moins bien estimés, et la probabilité qu'un accident se produise augmente.
  • Le personnel appelé à effectuer des travaux dans les peuplements riches en bois mort doit être expressément préparé aux dangers particuliers de ces zones. La meilleure solution consiste à employer toujours les mêmes personnes expérimentées et bien formées.

Mesures lors du bûcheronnage

La première condition à prendre en considération pour garantir la sécurité du personnel employé dans les zones à risques liés à la présence de bois mort est de lui donner une formation adéquate, de choisir des méthodes de travail sûres et de lui fournir des outils appropriés (fig. 2). Les collaborateurs travaillant dans les peuplements riches en bois mort doivent en outre être en mesure de prendre les décisions qui s’imposent, tout en étant libérés des contraintes liées au rendement. La décision d’abattre un arbre ou non appartient aux travailleurs formés, opérant sur place. Lors de travaux de bûcheronnage, nous recommandons les mesures suivantes :

  • Tous travaux de bûcheronnage dans un peuplement riche en bois mort doivent être consciencieusement préparés. Idéalement, le propriétaire, le représentant du mandataire ainsi que les collaborateurs marquent ensemble et signalent clairement le bois mort sur pied. Cette étape devrait en principe avoir lieu quand la vision à l’intérieur de la forêt est bonne, c’est-à-dire avant l’apparition du feuillage dans les forêts riches en feuillus.
  • Avant le début des travaux d’abattage, l’équipe au complet visite la coupe prévue, discute de la procédure à suivre et évalue les risques particuliers (fig. 3).
  • Chaque arbre et son environnement doivent être soigneusement examinés pour déterminer la technique d’abattage la plus sûre. Il convient également de toujours définir un lieu de retraite sûr et d’en dégager l'accès, afin qu’après la coupe, il puisse être rejoint immédiatement. Il vaut mieux renoncer à l’utilisation de coins lors de la coupe. Une bonne communication au sein de l’équipe doit être garantie, par exemple à travers l’utilisation de casques-radios.
  • Au moment du débardage, il faut en outre veiller à ce que les troncs ne touchent pas de bois mort. Les travailleurs forestiers ne doivent pas se tenir à côté du poids tracté et le treuil doit être manœuvré à l'extérieur de la zone dangereuse. Si un hélicoptère est utilisé, tout le bois mort sur pied de la zone dangereuse devrait être examiné quant à sa stabilité et, en cas de doute, abattu.
  • Une autre possibilité pour atteindre plus de sécurité lors de travaux dans les peuplements avec bois mort sur pied consiste à l’abattre l’arbre au moyen d'un tire-fort ou d’un treuil, sans utiliser de tronçonneuse. Le câble doit être fixé le plus haut possible, en s'aidant au besoin d’une échelle, afin de pouvoir travailler au maximum sans vibrations.

Synthèse

Dans les peuplements riches en bois mort, le bûcheronnage est plus dangereux qu'ailleurs. Les dangers peuvent néanmoins être largement réduits, pour autant que tous les participants, du mandant à l’exécutant, soient conscients des risques encourus, aient été formés et sachent prendre leurs responsabilités à leur niveau. L'employeur est, en fin de compte, responsable de la mise en œuvre des mesures nécessaires. Les collaborateurs doivent avoir reçu une formation spécifique et posséder les compétences nécessaires pour décider, au cas par cas, du bien-fondé d’un abattage et de la manière de s’y prendre. Les mandants gérant des projets de protection de la nature en forêt doivent prendre en considération l'aspect de la sécurité au niveau de la planification.

Traduction: Guaraci forest consulting SA