Dans le présent article, le terme d’ « exploitation forestière » regroupe toutes les actions liées à la gestion sylvicole et au débardage du bois. L’objet de cet article est de tenter d’étudier tous les aspects ayant des conséquences sur les cours d’eau situés en milieu sylvicole, en tenant également compte de la gestion sylvicole. Lorsque l’on étudie les actions prises en milieu sylvicole, on établit une distinction entre les effets et les conséquences.

On dit généralement que les actions prises sur un cours d’eau situé en milieu sylvicole et son environnement ont des effets lorsque

  1. leur influence n’est ni importante ni durable ou lorsque
  2. elles ont une influence positive sur le cours d’eau, par exemple en favorisant la présence de bois mort dans le cours d’eau.

Bien entendu, la définition d’un effet et d’une conséquence peut être variable en fonction du point de vue de l’observateur. Ainsi, le débardage du bois dans l’environnement d’un cours d’eau peut être considéré comme une mesure ayant une forte influence sur le milieu, car elle modifie le degré de couvert. Le débardage peut tout à fait avoir des effets positifs sur le milieu s’il s’agit d’une coupe d’éclaircie, telle qu’on la pratique couramment. Celle-ci a pour objet d’entretenir la population sylvicole dans le cadre d’une exploitation mesurée (voir à ce sujet la loi régionale de Bade-Wurtemberg sur l’exploitation forestière LwaldGesetz, paragraphes 12, 14 et 22). Les conséquences de ce type d’action sur le cours d’eau ne sont ni importantes ni durables, elles sont donc tout à fait justifiées dans un contexte de protection des cours d’eau. Par contre, une coupe claire à grande échelle aura des conséquences importantes sur le cours d’eau si elle concerne un linéaire de plusieurs centaines de mètres.

La présente étude porte spécifiquement sur les cours d’eau petits et moyens, sur lesquels la gestion sylvicole peut avoir une influence particulièrement marquée. Les cours d’eau petits et moyens sont définis comme des cours d’eau ayant une largeur comprise entre 5 m et 10 m et un débit moyen annuel inférieur à 5 m3/s. En outre la surface de leur bassin versant est inférieure à 150 km2 (Schwabe 1987, Böttger & Pöpperl 1990). Pour établir la distinction entre les ruisseaux (cours d’eau petits et moyens) et les fleuves, Humborg (1995) propose une définition simple et pratique : On considère qu’un fleuve commence à partir du moment où la largeur du cours d’eau est telle que le peuplement sylvicole le long des berges n’est plus en mesure de créer un couvert au-dessus du lit du cours d’eau. D’après les travaux de Otto (1991), c’est surtout dans le cas des petits cours d’eau que le peuplement sylvicole le long des berges joue un rôle important sur le cours d’eau. Dans le cas des fleuves, ce rôle est bien moindre.

Le tableau n°1 présente un aperçu de l’étendue du réseau hydrologique de la Région du Bade-Wurtemberg et de la portion de ce réseau (ruisseaux et rivières) située en milieu forestier. Il faut également préciser que la longueur réelle du linéaire est supérieure à la longueur évaluée par l’Office régional de l’environnement du Bade-Wurtemberg (LfU) dans le cadre de sa cartographie du Réseau de cours d’eau officiellement reconnu (AWGN). En effet, le réseau officiel AWGN ne tient pas entièrement compte des particularités de la géométrie des cours d’eau : ceux-ci comportent de nombreux méandres, alors que l’AWGN considère qu’ils sont généralement rectilignes. Cette approximation entraîne une sous-évaluation du linéaire total. On considère en conséquence que la longueur totale du linéaire de tous les cours d’eau de Bade-Wurtemberg devrait dépasser les 50.000 km, dont environ 40.000 km de petits et moyens cours d’eau (Office régional de l’environnement, LfU 1998).

Tab. 1: Le réseau hydrologique de Bade-Wurtemberg : Linéaire total en milieu forestier. Etude basée sur les données suivantes : banque de données ATKIS, version 03/2002 (surfaces sylvicoles) et banque de données LfU "Fluss10k", version 12/2002 (cours d’eau). Dans cette étude, les cours d’eau situés en milieu sylvicole ont été recensés avec précision : on a effectivement recensé le linéaire couvert de forêts.

Actions sylvicoles ayant une influence sur les cours d’eau

Afin de pouvoir évaluer les conséquences des actions prises dans le cadre de l’exploitation forestière, il est nécessaire de définir une échelle de mesure. Cette échelle de mesure doit être définie de manière à ce que l’on puisse évaluer les mesures en ce qui concerne leur influence sur l’état des cours d’eau. Dans le cadre des présents travaux, on a utilisé l’écologie des cours d’eau et plus particulièrement l’observation de la faune des cours d’eau pour évaluer les mesures sylvicoles et l’état des cours d’eau situés en milieu forestier. Ainsi, ces travaux se placent dans la droite ligne de la Directive cadre sur l’Eau de l’UE en ce qui concerne son approche scientifique. En effet, la Directive prévoit de dresser un bilan de l’état de nos cours d’eau – ou monitoring des cours d’eau – qui permettra de vérifier si les dispositions de la Directive sont effectivement respectées, en particulier sur la base de caractéristiques de la faune et de la flore des cours d’eau.

Les actions entreprises dans le cadre de l’exploitation sylvicole des forêts génèrent différents types de conséquences sur les cours d’eau. Nous les avons classées en différents chapitres intitulés interventions sylvicoles, construction de routes et chemins et débardage et stockage du bois. Ces types d’interventions sont décrits et évalués en fonction de leur influence sur la faune des cours d’eau. Les évaluations réalisées ici se basent sur les publications scientifiques consacrées à ce sujet et sur des études propres.

Interventions sylvicoles

D’après Scherzinger (1996), c’est surtout l’action de modelage de la forêt en vue de son exploitation pour la chaîne du bois qui a des conséquences marquées sur les écosystèmes sylvicoles. Parmi ces conséquences, nous avons relevé celles qui sont les plus dimensionnantes pour les cours d’eau :

  • L’action d’orientation du mélange des essences en faveur d’essences plus « rentables », ce qui entraîne un appauvrissement de la diversité des essences.
  • L’abaissement de l’age moyen du peuplement sylvicole, ce qui entraîne une réduction durable de la part de bois mort.
  • La fragmentation de la forêt par la construction de voie d’accès et de surfaces de débardage.

L’orientation du mélange des essences : le peuplement non diversifié des zones alluviales en essences de résineux plus rentables, et particulièrement en épicéas (picea abies), essence naturellement non représentée dans ces zones, modifie la richesse des nutriments allochtones dans les cours d’eau, principalement influencée par l’apport en feuilles. Les travaux de Hering et al. (1993) et de Fri­berg et al. (2002) par exemple, présentent un bilan des effets du peuplement des zones alluviales en essences résineuses sur les associations biologiques du zoobenthos des cours d’eau.

Hering et al. (1993) ont par exemple pu démontrer que l’apport d’aiguilles de résineux avait une influence sur la composition du zoobenthos de cours d’eau de moyenne montagne en ce qui concerne les types d’alimentation. Sur les cours d’eau étudiés, la fréquence des espèces broyeuses comme Asellus ou Gammarus était bien inférieure dans les zones plantées d’épicéas que dans les zones comportant des feuillus : la différence était d’un facteur 5. La réduction du peuplement de ces espèces peut être expliquée par le fait que les aiguilles de résineux sont plus difficiles à digérer par les micro-organismes. En conséquence, les espèces broyeuses ont moins de possibilités de s’en nourrir. On a par exemple pu constater que les aiguilles d’épicéas ne faisaient pas partie de l’alimentation d’une certaine espèce de gammares. Les études récentes menées par Friberg et al. (2002) au Danemark permettent d’obtenir des résultats semblables. En comparaison avec les ruisseaux situés au milieu de hêtraies, les ruisseaux situés au milieu de plantations d’épicéas, les biomasses d’insectes de type broyeurs sont inférieures d’environ 4/5e. Ce phénomène trouve son explication dans des facteurs tels que la température de l’eau, les éléments chimiques dissous et la diversité des sources de nourriture. Les auteurs de publications insistent particulièrement sur les conséquences sur la production secondaire. Les insectes broyeurs jouent un rôle important par la préparation de la décomposition des résidus végétaux de grandes dimensions et leur transformation en détritus (matériau organique à particules fines). Il s’agit là en particulier des feuilles issues de peuplements sylvicoles proches des cours d’eau. Par leur action de broyage, ces insectes transforment les matériaux à grosses particules au profit des espèces détritivores ou suspensivores (Schwoer­bel 1999). On constate que, si l’état de l’environnement entraîne une réduction importante de la part des insectes broyeurs, cela a des conséquences considérables sur la chaîne benthique des consommateurs.

De même, les insectes herbivores (se nourrissant d’algues) et suspensivores, ainsi que les prédateurs, sont présents en quantité nettement moins importante dans les cours d’eau bordés de résineux, en comparaison avec les cours d’eau bordés de feuillus : différence de 1/4 à 1/3 dans le nombre d’individus. On considère que cette différence entre les peuplements de feuillus et les peuplements de résineux ou d’épicéas est due au manque de nourriture induit par la faible luminosité, l’absence de feuilles ou de détritus qui pourraient constituer un biotope important pour les prédateurs. Les résultats des études réalisées par la Forstliche Versuchs- und Forschungsanstalt Baden-Württemberg (FVA) ont également permis de constater que, dans le cas de cours d’eau bordés de peuplement majoritairement résineux, la présence de quelques feuillus ou de quelques bosquets de feuillus semble suffisante pour maintenir un niveau benthique semblable à celui des cours d’eau bordés de peuplements de feuillus.

La migration des espèces animales par la voie des airs le long des cours d’eau, on pense ici en particulier aux insectes qui remontent le cours d’eau, est influencée par la composition et la structure des peuplements sylvicoles sur les berges de ces mêmes cours d’eau. Pour diverses espèces d’insectes qui effectuent des vols de compensation vers l’amont du cours d’eau, les travaux de Hering et al. (1999) ont permis de démontrer que des peuplements denses et homogènes d’épicéas de 25 à 40 ans constituaient un handicap à la prolifération. On considère que cet effet de barrière est dû à divers éléments : des peuplements denses de résineux constituent un écran à la vision, la température qui y règne est inférieure à celle de peuplements de feuillus : ils peuvent donc constituer une barrière climatique. En outre, un peuplement dense peut représenter un obstacle au passage du vent qui, le soir souffle en direction de la vallée et sert aux insectes de repère à l’orientation. Ces fonctions d’obstacle influencent principalement les espèces d’insecte qui ont un rayon d’action réduit et qui sont étroitement liés aux cours d’eau, comme par exemple les éphéméroptères ou certaines espèces de trichoptères. En ce qui concerne les espèces d’insectes très mobiles, comme par exemple les libellules, ces effets de barrière sont moins importants.

L’abaissement de l’âge d’un peuplement sylvicolepar son exploitation avant qu’il ait atteint sa maturité naturelle entraîne un manque de bois mort, ce qui a des conséquences non seulement sur les biotopes terrestres mais aussi sur les biotopes aquatiques. La fonction du bois mort est très importante dans un cours d’eau : pour la structure du cours d’eau, l’évolution du courant, l’hydraulique, l’hydrologie, ainsi que la flore et la faune (il est tout à la fois biotope et source de nourriture – GFG & WBW 2001). Nous nous proposons ici de décrire le rôle du bois mort pour la structure des cours d’eau et plus particulièrement sa fonction de créateur de bassins plus profonds (pools). Que ce soit dans les cours d’eau de montagne ou dans les rivières de plus grand débit, le fond du cours d’eau est typiquement constitué d’une alternance de passages de faible profondeur (riffles) et de passages plus profonds (pools). De tels bassins (pools) peuvent atteindre une grande profondeur, ils sont créés par la présence de bois mort dans le cours d’eau. De telles zones profondes sont des refuges importants pour les populations piscicoles, en particulier en saison estivale où le niveau du cours d’eau est bas (Carlson et al. 1990, Gurnell et al. 1995). En outre, ces bassins constituent un refuge vis à vis des prédateurs (le héron cendré par exemple). En période de crue, le courant y est moins fort et les populations piscicoles viennent s’y réfugier en grand nombre (Maser & Sedell 1994). Certaines études ont également montré que la présence de bassins plus profonds semble être un facteur limitatif de l’importance d’une population piscicole. Plus exactement, on peut dire que, en fonction de la profondeur du cours d’eau dans une zone donnée, on trouvera un peuplement piscicole relativement homogène en ce qui concerne les espèces présentes et l’âge des individus (Fausch & Northcote 1991, Bilby & Ward 1989).

La présence de bois mort dans un cours d’eau entraîne également la formation de structures morphologiques ou d’effets importants pour l’écologie du cours d’eau : il s’agit de la formation de bassins de retenue où les eaux sont dormantes, ainsi que du développement latéral du cours d’eau par érosion des berges. Les zones d’eau dormante sont créées par la présence de bois mort, couché perpendiculairement au sens d’écoulement de l’eau et s’étendant d’une berge à l’autre du cours d’eau (Bilby & Ward 1989). L’érosion des berges est augmentée par la présence de bois mort : il dirige en effet l’énergie du courant en direction des berges et favorise donc la variance de largeur (c’est à dire l’alternance de passages plus ou moins larges) (Gurnell et al. 1995, Robison & Beschta 1990). Ainsi, le bois mort peut être un facteur qui favorise le retour à l’état naturel d’un cours d’eau (Hering & Reich 1997).

Si elle favorise la formation de bois mort dans l’environnement des cours d’eau, l’exploitation sylvicole peut apporter un concours à la présence d’une plus grande quantité de bois mort dans les cours d’eau situés en milieu sylvicole. Tout en respectant les dispositions de la réglementation de Bade-Wurtemberg sur l’eau (le paragraphe 47 de la Loi sur l’Eau de Bade-Wurtemberg prévoit que l’on supprime les obstacles au bon écoulement d’un cours d’eau), l’exploitant forestier ne devra, étant donné son rôle écologique majeur, procéder que de manière exceptionnelle à l’enlèvement du bois mort.

Fragmentation de la forêt par la construction de voie d’accès et de surfaces de débardage : l’objet du présent paragraphe est de décrire les conséquences des travaux de construction de voies de communication. La fragmentation d’une forêt par la coupe rase de parcelles d’une superficie inférieure à 1 ha n’est pas considérée comme un obstacle au bon développement du biotope que constitue le cours d’eau (avant de procéder à une coupe rase > 1,0 ha, l’article 15 de la Loi Forestière de Bade-Wurtemberg exige de l’exploitant qu’il fasse une demande auprès des autorités forestières compétentes).

Construction de voies d’accès

Il est évident que la construction de chemins forestiers destinés à faciliter l’accessibilité des parcelles sylvicoles, et plus particulièrement la construction d’ouvrages de franchissement, produit des obstacles à la continuité biologique longitudinale des cours d’eau. La présence d’ouvrages de franchissement est de nature à rendre plus difficile ou voire même à empêcher complètement les migrations de populations piscicoles ou de micro-organismes vivant dans les cours d’eau. En milieu forestier, les ouvrages de franchissement de petits cours d’eau (largeur du fond 2 à 3 m) sont généralement constitués de tuyaux de béton. En fonction de la morphologie du fond dans le tuyau, des conditions de luminosité et des courants, ces tuyaux peuvent ou non constituer un obstacle à la continuité biologique. De plus, en aval du passage busé, on constate souvent la formation d’une zone dénuée de tout sédiment et d’un seuil plus ou moins élevé. Un seuil élevé du côté écoulement du passage busé représente un obstacle important à la migration des populations benthiques et piscicoles. Les organismes qui vivent dans le fond du cours d’eau ou au-dessus de celui-ci ne sont pratiquement pas en mesure de franchir à contre-courant un passage busé qui présente un débit important et un fond lisse. En outre, un passage busé long et étroit (> 25 – 30 m) présente une luminosité très faible. La migration des populations piscicoles y est très difficile, voire impossible pour les ouvrages plus longs (> 50 m) (Liebsch et al. 1995).

Suite à l’exploitation des données recueillies dans le cadre d’une étude des cours d’eau en milieu forestier réalisée par la FVA, les auteurs ont été surpris de constater le grand nombre (relatif ou absolu) d’ouvrages de franchissement sur un kilomètre de cours d’eau (tableau 2). Dans le meilleur des cas (Canton de Villingen-Schwenningen), on trouve un ouvrage de franchissement sur 2 kilomètres. Dans le pire des cas (Canton de Bad Rippoldsau), ce nombre peut aller jusqu'à un ouvrage tous les 175 m. La moyenne de toutes les régions étudiées se situe à 1 ouvrage de franchissement (généralement un passage busé) tous les 300 m environ.

Afin de mieux connaître les conséquences de la présence d’un si grand nombre d’ouvrages de franchissement, en particulier sur la population piscicole, on a procédé sur le Canton de Nürtingen à des évaluations précises sur 53 ouvrages de franchissement, conformément à la procédure d’évaluation mise au point par la FVA. La longueur des ouvrages busés va de 3 à 33 m au maximum. La valeur moyenne se situe à 8,5 m. Les tuyaux plus anciens ont un diamètre allant de 30 à 40 cm, les plus récents entre 50 et 100 cm. Le diamètre le plus important mesuré sur un ouvrage est de 300 cm.

Pour déterminer à quel point un passage busé constitue un obstacle à la continuité écologique, le facteur déterminant est avant tout la hauteur de seuil à franchir par la population piscicole. Pour les espèces disposant d’une faculté réduite à sauter les obstacles comme le chabot commun (Cottus gobio), une hauteur de seuil de 20 cm est suffisant pour faire d’un passage busé un obstacle infranchissable. Sur les 53 ouvrages étudiés, on a constaté sur 19 d’entre eux (36%) un seuil de 10 à 80 cm de haut. Sur 11 ouvrages, le seuil était >= 20 cm (21 %). On peut donc dire qu’environ 1/5e des passages busés étudiés représentent un obstacle important à la migration du chabot commun. Pour cette espèce piscicole, il est possible de rétablir la continuité biologique au moyen de travaux d’adaptation de l’ouvrage. Des travaux antérieurs (Bönecke 2002b) ont décrit les mesures à prendre. De telles mesures sont également décrites dans l’article signé Bönecke, Gilly et Rinderspacher.

Débardage et stockage du bois (stockage humide)

Débardage : lors de l’exploitation du bois, les travaux d’abattage et de débardage peuvent occasionner des endommagements de la structure des berges et de la végétation de la zone alluviale et des berges. En outre, les endommagements du sol par le matériel lourd de débardage peuvent entraîner une augmentation de l’apport de sédiments fins dans les cours d’eau. Dans les deux cas, en fonction de la fragilité du site concerné ou de la présence d’espèces animales et végétales menacées, des conséquences négatives ne sont pas à exclure. La moule d’eau douce (unio crassus) est une espèce animale qui réagit de manière particulièrement sensible à l’apport de sable ou de sédiments dans l’eau du cours d’eau. Cette espèce est menacée d’extinction en Bade-Wurtemberg. On la rencontre encore de manière isolée dans les cours d’eau en milieu forestier, en particulier dans la zone intermédiaire de ruisseaux à fort débit dans les zones collinéenes. (LfU 1995, Bayerisches Landesamt für Umwelt­schutz 1995).

Avec le développement du débardage mécanique, la desserte dite « de détail » des surfaces sylvicoles [1] a pris de plus en plus d’ampleur depuis le milieu des années 80. En ce qui concerne les cours d’eau situés en milieu sylvicole, deux points sont à respecter. Les constatations et recommandations faites au chapitre 0 et concernant la construction de chemins forestiers s’appliquent également à la construction d’ouvrages de franchissement pour pistes pour machines. D’autre part, si l’on souhaite conserver l’accessibilité des parcelles par les layons de débardage, il convient de recourir avec parcimonie aux mesures telles que l’apport ponctuel de branchages ou de graviers. Ces mesures de consolidation du sol ne doivent en aucun cas servir au franchissement de petits cours d’eau croisant un layon de débardage.

Stockage humide : Les études réalisées par le Centre de recherches forestier de Hesse (hessische Forstliche Versuchsan­stalt, Hammes 1989, Best et al. 1994) sur des échantillons d’eau d’arrosage des stockages humides n’ont pas permis de détecter une altération préoccupante de la qualité de l’eau. Ces analyses ont porté sur la valeur de pH, la conductibilité électrique et certains éléments anorganiques dissous dans l’eau. Si, lors de la première phase du stockage humide, on constate un net enrichissement des concentrations en NH4, des valeurs de CSB et de BSB5, il est également établi que ces modifications de la qualité de l’eau baissent fortement dans la première année du stockage humide du bois. On a constaté que les combinaisons organiques dégagées par le stockage humide sont, pour la plupart, biodégradables sur le plan bactériologique et ne contiennent pas d’éléments toxiques. Les échantillons d’eau prélevés environ 100 m en aval du point de déversement des eaux d’humidification des stockages de bois n’ont pas permis de déceler une influence sur la qualité de l’eau. Suite à une étude documentaire détaillée, Rupp (2002) tire les conclusions suivantes : aucun élément en notre possession ne nous permet de conclure que la mise en place d’un stockage humide entraîne des dégâts graves sur les populations piscicoles ou même une disparition de celles-ci. Rupp considère néanmoins que l’apport d’eau d’humidification d’une quantité de bois supérieure à 2.000 stères constitue une charge importante sur l’eau qui peut avoir des conséquences négatives sur les associations biologiques aquatiques.

D’une manière générale, on peut conclure que le stockage humide de bois en grumes n’entraîne pas d’effets négatifs durables sur les cours d’eau, à condition de respecter un certain nombre de règles pour la mise en place et l’utilisation des zones de stockage (exemple : Office des forêts de Freiburg, 2000).

[1] On parle de desserte de détail ou de cloisonnement d’exploitation lorsque le débardage est assuré uniquement à partir du réseau de chemins existant. A partir de ces chemins, le débardage est assuré au moyen d’équipements mécaniques, par des layons de débardage et des lignes de câbles. Dans son principe, la desserte de détail n’est pas une nouveauté. Cette méthode de débardage est de plus en plus utilisée car elle permet d’utiliser du matériel lourd sans occasionner de dégâts importants sur les sols (voir également MLR 2003).

Traduction

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