C’est dans les forêts d’Etat et dans les forêts communales de l'ancien Service forestier de Kandern, dans le district de Lörrach, au sud-ouest du Bade-Wurtemberg, que poussent les sapins de douglas de loin les plus gros et les plus anciens en Allemagne. L’introduction originelle du-dit « sapin du diable » date de 1879. Entre 1907 et 1936, la culture du douglas a été fortement promue par le responsable du service, Wilhelm Hamm. Cette période est à l’origine d’un grand réservoir de douglas robustes, ayant été élagués tôt et en hauteur, présents dans des peuplements mélangés très variés et sur une large palette de stations. Ils atteignent maintenant le diamètre d’exploitabilité et arrivent progressivement sur le marché.

Répartition

Les douglas ont été introduits en Allemagne sur une longue période, en touffes ou en groupes, en particulier pour améliorer les trouées occasionnées par les bris de neige et de glace, améliorer la régénération naturelle ou pour être plantés le long des chemins. Un nombre important de tiges a été élagué tôt et jusqu’à une hauteur de 10-15 m. Dans les vieux peuplements, il était fréquent d’élaguer 200 à 300 arbres/ha. Après la Seconde Guerre mondiale, le douglas a été cultivé à grande échelle en remplacement des peuplements de hêtres à croissance plus lente. En revanche, sa proportion en monocultures est restée faible et, depuis 1992, plus aucune plantation pure n’a été réalisée. Environ 51% des douglas sont présents dans des peuplements composés d’épicéas, de sapins et de hêtres en proportions variables.

Dans les forêts d’Etat de l’ancien Service des forêts de Kandern (3105 ha), le douglas représente 15% du volume sur pied ou 161’000 m3, dont 101’000 m3 ont un diamètre à hauteur de poitrine (DHP) d’au moins 50 cm selon le plan de gestion 2007.L’excellente qualité des arbres s’exprime avant tout par la forte proportion de peuplements semenciers (163 ha).

Le marché du douglas

Le marché du douglas est un marché de niche en forte croissance, ce qui explique que la demande nationale en billes de pied de haute qualité ne peut actuellement pas entièrement être satisfaite. Or, les marchés nationaux et internationaux du douglas sont en pleine croissance (par exemple pour les parquets en douglas) et seul un approvisionnement sécurisé peut favoriser le développement du produit. Au cours de ces dernières années, le prix moyen du douglas – y compris celui des produits fabriqués en série - se situait très nettement au-dessus de celui de l’épicéa, avec un rapport des prix des assortiments de douglas ayant évolué en faveur des gros troncs de haute qualité. Alors qu’en 1997, la plus-value entre le bois de qualité A par rapport au bois de qualité B était de 41 €/m3 pour le douglas, elle s’élève aujourd’hui à environ 100 €/m3.

L’offre en produits est aussi variée que la demande. Il y a 20 ans, seules quelques entreprises spécialisées travaillaient le bois du douglas, alors qu’aujourd'hui le douglas est livré à un grand nombre de clients. Jusqu’à présent, la production a été très fortement orientée vers le produit et la clientèle, ce qui donne au client une certaine sécurité dans sa planification. Le douglas profite actuellement de la tendance pour les bois naturellement colorés, où il remplace de plus en plus le bois de mélèze, dont la ressource est de plus en plus limitée.

Les possibilités de vente sur le marché suisse s’améliorent de manière continue. Le bois de douglas de grand diamètre et sans branches représente une valeur unique dans ce domaine de produits; il est particulièrement prédestiné pour la production de bois de sciage de haute qualité (rift / mi-rift). Alors que les débouchés pour le bois PZ et les lots de qualité B/C se sont beaucoup développés, ils restent encore limités en ce qui concerne les lots de qualité C/D avec beaucoup de branches. C’est le seul «problème» d’assortiment lié à cette essence. Le douglas est par contre utilisé sans restriction dans le domaine des palettes en bois.

Suite au passage de l’habituelle vente de gré à gré à un système d’appels d’offres restreints, le prix de vente moyen des bois de qualité supérieure a atteint 208 €/m3 (2009/2010). Il convient néanmoins de noter que le marché du bois de placage n’offre jusqu’à présent que peu de débouchés pour le bois de douglas indigène. Le critère de qualité principal est clairement l’absence de branches. Lors d’appels d'offres, les caractéristiques telles que largeur des cernes, formation du bois de cœur, excentricité, éraflures superficielles ou légère présence de pourritures n’ont qu’un effet secondaire sur le produit des ventes.

Traitement sylvicole

Des expériences très positives ont été réalisées avec l’introduction du douglas en touffes, groupes ou bouquets dans des peuplements dominés par le hêtre dans des forêts mélangées de montagne. Les peuplements sont stables, leur période de rotation est flexible et ils sont esthétiquement convaincants. Dans les forêts d’Etat, la part des grumes de qualité A dans les ventes de bois de douglas représente 10%, tandis que les parts des bois de qualité C et D sont nettement inférieures comparé à l’épicéa. Ceci est avant tout dû à la forte présence d’arbres élagués très haut. D’autre part, la forte pression latérale exercée par le hêtre et la concurrence au sein des groupes de douglas obligent les couronnes à s’étendre vers le haut tout en réduisant l’apparition de grosses branches. L’élagage reste néanmoins indispensable si l’on souhaite obtenir du bois de qualité.

Le douglas – une essence invasive?

Contrairement aux hypothèses émises autrefois, le «potentiel invasif» du douglas est faible, du moins sur nos sols d’origine. Toutes essences confondues, 45 % des peuplements âgés de plus de 60 ans comporte du rajeunissement naturel préétabli. La surface totale occupée par du rajeunissement naturel préétabli est passée de 519 ha en 1996 à 879 ha en 2007, avec 44% du rajeunissement total dominés par le hêtre. Avec à peine 7% du rajeunissement naturel, le douglas a seulement conservé la part de la surface qu’il occupait initialement, tandis que chez le sapin blanc par exemple, cette part est passée de 10 à 14% au cours de la même période. Dans le rajeunissement âgé de 10 ans, l’objectif est d’avoir 14% de douglas, ce qui nécessite parfois d’intervenir en sa faveur dans les surfaces où le rajeunissement est dominé par le hêtre. Sa régulation à travers la luminosité est souvent très difficile en raison de la forte vitalité du rajeunissement de hêtre et de sapin blanc, ce qui implique parfois qu’une régulation du mélange sous abri s’avère nécessaire.

Outre les mesures destinées à favoriser le douglas dans le rajeunissement naturel, son introduction artificielle devra être renforcée à l’avenir, en tant qu’essence de mélange à valeur ajoutée, là où le rajeunissement naturel du hêtre est incomplet.

Problèmes et questions ouvertes

La sylviculture du douglas sous abri pose problème lorsque les arbres se développent en forme de fuseau avec des branches extrêmement fines. Un autre aspect non élucidé, dont dépend leur stabilité, concerne le développement du système racinaire des douglas restés sous couvert pendant souvent 20 à 30 ans. L’écologie du rajeunissement du douglas n’est pas encore complètement comprise non plus. Les problèmes liés à la protection des forêts consistent d’une part en une augmentation des pertes provoquées par des maladies cryptogamiques (causant une perte importante des aiguilles) et d’autre part à la vulnérabilité des surfaces de rajeunissement pur de douglas face aux dégâts de neige. Si la commercialisation est facile pour des lots de qualité A, B ou C, le marché reste limité pour les grumes de qualité D avec beaucoup de branches.

Le douglas est une essence esthétique, flexible et productive. Sa période de production est très variable. C’est également une essence «honnête», car les caractéristiques qualitatives «internes» de son bois peuvent aisément être évaluées par les acheteurs potentiels. En cas d’élagage précoce du bois de qualité, on peut compter avec une augmentation des recettes de l’ordre de 80 à 100%. Avec le temps le bois de douglas de qualité a pris de plus en plus de valeur et cette tendance se maintiendra à l’avenir. Le marché du douglas est en pleine expansion puisque les utilisations se multiplient sans cesse et que de nouveaux produits sont créés. Le douglas est capable de se rajeunir sur une large palette de stations, mais son potentiel de rajeunissement a par contre largement été surestimé dans les conditions de nos régions (Fagetum).

Le douglas ne va certainement pas supplanter le sapin blanc indigène; le cas échéant, si cela s’avère nécessaire, le forestier procèdera à des interventions sélectives!