Depuis la révolution industrielle, les besoins toujours plus grands de l’industrie en matière ligneuse de qualité ont poussé le propriétaire à réfléchir comment répondre à cette demande. La culture de peupliers à fort accroissement a répondu à cette demande durant le 20ème siècle pour décliner à partir des années 90. Dans une région à fort potentiel de production, le populetum d’Yvonand (Canton de Vaud) permet de comparer les principaux cultivars italiens, allemands et belges avec quelques clones de référence utilisés couramment.

Le populetum d’Yvonand est situé entre Yverdon-les-Bains et Yvonand sur la rive Sud du lac de Neuchâtel (carte). Il s’étend sur 4,7 ha. Le populetum a été mis en place en plusieurs étapes depuis 1996 à 2000. Le but était de comparer les principaux cultivars italiens, allemands et belges avec quelques clones de référence utilisés dans la région, ce sont : I 45-51(Italie), 20-112 et 20-36 (Allemagne). Le 20-36 a été supprimé en 1998 pour cause de mortatilté proche de 100%.

Un premier état des lieux a été effectué en 2008 sous forme d’inventaire intégral par le garde-forestier des lieux, Philippe Perey.

Quelques généralités sur les peupliers de culture

Le genre populus est divisé en 5 groupes/sections dont trois sont présents dans le populatum (voir figure 2).

Les peupliers hybrides ont été créés par pollinisation croisée entre deux espèces. Ils sont ensuite multipliés par bouturage.

Un clone regroupe les individus reproduits par bouturage à partir d'un seul arbre (tête de clone).

Un cultivar est un clone cultivé couramment.

Les clones ont été distribués sur la surface par groupes de 9 de manière aléatoire (informations techniques et caractéristiques de chaque clone). La qualité du sol, notamment son humidité, a une influence sur l’accroissement de la végétation ligneuse. La présente analyse tient compte de ce paramètre. Toutefois la fertilité du sol n’est pas seulement favorable au peuplier, mais aussi à la végétation ligneuse poussant naturellement sur la station.

Inventaire 2008

En 2008, 671 tiges ont été inventoriées et examinées attentivement. Cinq clones présentent de meilleurs résultats que le meilleur des clones utilisés habituellement dans la région (beige sur la figure 4). Toutefois, les accroissements restent très modestes pour du peuplier.

L’analyse du garde-forestier fait état de présence de rouille, de gui et de saperde en mains endroits. Ces facteurs ont une incidence certaine sur la croissance. De plus, sur l’ensemble de la surface, les bouleaux, aulnes noirs et peupliers trembles se développent et concurrencent les peupliers plantés.

Inventaire 2016

L’inventaire de 2016 a été effectué à l’aide d’un GPS-GNSS fonctionnant sous la canopée et un appareil de saisie muni d’un SIG mobile (fig. 5). Les deux périphériques sont reliés via Bluetooth. Cet équipement permet de géo-référencer chaque tige en X / Y à +- 1 mètre. Un télémètre laser complète cet équipement. Chaque peuplier inventorié est identifié, son diamètre à hauteur de poitrine (DHP) saisi et son état sanitaire évalué (normal/dépérissant).

Résultats

Le résultat porte uniquement sur les arbres encore verts, soit 479 tiges. Entre 2008 et 2016, 196 tiges ont péri, soit 29 % des tiges inventoriées en 2008. Les valeurs en dessous du seuil de 20 tiges n’ont pas été intégrées au classement.

L’accroissement est calculé par rapport à l’année de plantation dans le bloc « Plantation-2016 » et par rapport à 2008 dans le bloc « Période 2008-2016 » (fig. 6). Cette séparation des deux blocs permet de mesurer l’accroissement annuel des dernières années et de constater une augmentation, une stagnation ou un ralentissement de la croissance en diamètre.

En comparatif avec I 45-51, seul le Ghoy montre une augmentation significative (on ne peut tenir compte du seul Dvina survivant), les clones Primo, Gaver montrent une légère augmentation. L’accroissement en diamètre est faible pour des clones à haut rendement. La concurrence féroce exercée par les essences ayant poussé naturellement explique largement le phénomène ; à cela, s’ajoute l’état sanitaire général des peupliers mis en place.

Sur les 479 tiges inventoriées encore en vie, 54 d’entre elles sont dépérissantes soit environ 11.3 %. Certaines d’entre elles avaient déjà été identifiées comme telles lors de l’inventaire de 2008.

Influence de l’humidité du sol

L’inventaire de 2016 a permis de mettre en évidence la forte influence de l’humidité du sol sur l’accroissement. La figure 7 ci-dessous le démontre.

Les couleurs correspondent à la carte de la figure 3. Les seuils respectent aussi les proportions des tiges inventoriées dans chaque catégorie de sol. Toutefois, si la perte est si faible au point que le seuil ne puisse être atteint lors de la répartition, le nombre réel est pris en compte (p. ex. Raspalje).

Du point de vue de l’accroissement, si l’on fait la synthèse des classements, (colonne de droite), on constate que le clone « régional » 45-51 reste une valeur sure pour les terres de la région des Trois Lacs. Le Raspalje se classe en tête, devant le 45-51 ; il est suivi par les clones Boelare (moyen), Gibecq et Ghoy. Si l’on devait introduire de nouveaux clones pour les zones moyennes à séchardes, le Raspalje et le Ghoy seraient des options envisageables.

Conclusion

Malgré le constat d’un accroissement général très moyen (cernes de moins d’1 cm pour les meilleurs, les tests comparatifs, montrent d’une part la fiabilité du clone I 45-51 déjà utilisé dans la région, mais aussi des qualités de résistance et d’accroissement du Raspalje qui se distinguent nettement de tous, ainsi que de bonnes aptitudes du Boelare (sols moyens), du Gibecq et du Ghoy.