Des participants aux cours de protection des sols de l’Institut de recherches WSL ont demandé à plusieurs reprises au cours des dernières années si un transport à mi-charge sur des sols très humides pouvait contribuer à épargner les sols. Pour des charges par essieu inférieures, on s’attendrait généralement à ce que le tassement du sol soit moins marqué et moins profond.

Lorsqu’il faut débarder une certaine quantité de bois, diviser les charges par deux implique de faire deux fois plus de trajets. L’expérience de la pratique indique que cela représente plutôt un désavantage quant à la formation d’ornières. Mais les conditions dans lesquelles un transport à charge réduite s’est déroulé n’étaient généralement pas connues, c’est-à-dire que l’on manque d’informations sur la structure et les caractéristiques du sol, son humidité, le poids roulant des machines et le nombre exact de passages.

    Pour cette raison, le WSL a conduit une étude de cas dans l’exploitation forestière Wagenrain de Bremgarten (canton d’Argovie). Sur deux pistes de débardage parallèles présentant des conditions comparables et surtout connues, un essai de transport a été effectué pour répondre aux deux questions suivantes:

    • Comment les transports sur une piste de débardage à mi-charge et avec un nombre de passages doublé agissent-ils sur le tassement du sol et la formation des ornières?
    • Quelles différences peut-on constater entre le premier passage sur un sol forestier et les passages suivants sur une piste de débardage déjà existante et tassée?

    Installation expérimentale

    L’expérience a eu lieu sur deux pistes de débardage existantes dans une station de type «hêtraie à aspérule avec luzule» (fig. 2, pistes 1 et 2). Ces pistes de débardage ont été utilisées pour la dernière fois il y a environ 10 ans. Entre ces deux pistes, les scientifiques ont choisi en plus une nouvelle piste avec des conditions similaires sur un sol qui n’a pas encore été parcouru (piste 0) pour observer les différences entre un premier passage et des passages répétés.

    Le sol de la parcelle d’essais est constitué d’une terre acide brune ou brune lessivée profonde, pauvre en squelette, influencée localement de manière modérée par l’eau stagnante. La granulométrie correspond principalement à celle d’une argile sableuse.

    Sur toutes les pistes, on a aménagé un tronçon à faible teneur en eau, et un autre à forte teneur en eau. «Faible teneur en eau» correspond à la teneur de 25 %, déjà assez élevée due aux conditions météorologiques au moment des essais (juin 2013). Le tronçon «Teneur élevée» correspond à la limite de liquidité du sol (environ 33 %), obtenue par arrosage.

    Quatre passages à pleine charge ont été effectués sur la piste 1, et huit passages à mi-charge sur la piste 2. Sur la nouvelle piste G0, constituée de sol qui n’a jamais été parcouru, deux passages à pleine charge ont été effectués. Avant et après les passages, l’état des ornières a été déterminé visuellement après discussion, et des relevés physiques du sol ont été effectués:

    • Un prélèvement par cylindre à échantillonnage a été effectué pour les études physiques et mécaniques des sols en laboratoire (compacité, volume des pores, précompactage, conductivité de l’air et de l’eau).
    • À l’aide d’une sonde PANDA, la résistance à la pénétration (c’est-à-dire la force nécessaire pour traverser le sol avec une pointe métallique) a été mesurée sur tous les tronçons avant et après le passage. Cela permet de montrer avec quelle intensité et à quelle profondeur le sol a été compacté par le transport.
    • Les ornières ont été affectées visuellement aux types 1, 2 et 3 après le passage.
    • En outre, le groupe de recherche Télédétection du WSL a documenté les ornières par balayage laser 3D avant et après le passage (fig. 3).

    Moins de tassement avec une demi-charge

    Les paramètres suivants ont été étudiés:

    • Densité de charge
    • Volume des pores
    • Capacité de conduction de l’air et de l’eau
    • Pré-compactage (élasticité du sol)
    • Résistance à la pénétration

    La compacité était plus importante aux deux profondeurs pour une charge pleine que pour une demi-charge (fig. 4). De même, le volume des pores était plus faible à pleine charge. La conduction de l’air et de l’eau a légèrement diminué après le passage aussi bien à pleine charge qu’à mi-charge. En ce qui concerne le pré-compactage, mesure de l’élasticité du sol, il n’a pas été possible de constater de modification importante après le passage. Cela signifie que les pistes de débardage démontrent une certaine capacité porteuse en raison du compactage des passages antérieurs. Comme attendu, la résistance à la pénétration après le passage à pleine charge a été généralement plus élevée qu’à mi-charge. Quelques valeurs peu plausibles sont apparues en raison de la présence de pierres ou de racines dans le sol.

    Conclusion: une charge inférieure implique un compactage du sol moindre et moins profond, même avec un nombre de passages plus élevé.

     

    Pas de résultats clairs concernant la formation d’ornières

    Sur les tronçons à teneur en eau réduite (env. 25 %), il a été pratiquement impossible de constater une différence entre le passage à pleine charge et le passage à mi-charge pour la formation d’ornières. Sur les tronçons à teneur en eau élevée (33 %, proche de la limite de liquidité du sol), la formation d’ornières était en général plutôt moindre à mi-charge, mais l’étude de cas ne permet pas de conclusion certaine dans ce domaine.

    Une étude semblable, que Wöstefeld (2011) a effectuée sur deux sites différents avec des sols influencés par l’eau stagnante dans le sud de la Forêt-Noire (argile sableuse) et dans le nord de la Forêt-Noire (sable faiblement argileux) avec des porteurs à huit roues, est arrivée à une conclusion contraire: des ornières plus profondes se sont formées pour des charges partielles et un nombre plus élevé de passages. Pour pouvoir répondre de manière plus fiable à la question de la formation des ornières, il serait nécessaire de conduire d’autres essais sur des parcelles avec différentes structures de sol.

    Wöstefeld a en outre étudié dans la Forêt-Noire l’impact sur la formation d’ornières de passages plus nombreux avec des charges partielles lorsque le porteur est équipé de quatre chenilles, celles à larges plaques étant montées sur l’essieu arrière: l’utilisation de chenilles avec des charges partielles a réduit la formation d’ornières malgré le nombre plus élevé de passages. Cet effet devrait découler de la plus grande surface de contact des chenilles porteuses avec le sol par rapport à un véhicule sur roues, et du patinage réduit lors du passage.

    Conclusion: l’approche «débardage à mi-charge» n’est pas forcément recommandée pour réduire la formation des ornières sur la base des connaissances actuelles.

    Important: faible humidité du sol lors du premier passage

    Pour compléter les pistes préexistantes 1 et 2, la piste 0 a été aménagée sur un sol jusqu’ici vierge de tout passage (fig. 2) afin de déterminer la différence entre le premier passage et les passages ultérieurs sur un sol forestier. Le premier passage modifie plus fortement la structure du sol que les passages ultérieurs sur un sol précompacté. Comme on pouvait s’y attendre, le sol du secteur à forte teneur en eau a été compacté plus fortement que celui à faible teneur. De la même manière, des ornières plus marquées sont apparues dans le secteur à forte teneur en eau sur le sol encore vierge de la piste 0 que sur la piste de débardage existante G1.

    Ces observations confirment que le premier passage sur un sol, par exemple sur une nouvelle piste de débardage, doit s’effectuer dans des conditions favorables, c’est-à-dire par humidité réduite. Ceci prépare un terrain plus favorable pour les passages ultérieurs.

      Conséquences pour la pratique

      Les essais pratiques démontrent que, comme on pouvait s’y attendre, le débardage à mi-charge compacte le sol moins fortement et moins profondément. L’efficacité de cette mesure pour réduire la formation d’ornières reste cependant incertaine pour les véhicules sur roues d’après les constatations obtenues jusqu’ici. Même à mi-charge, le poids total à vide de la machine est toujours présent. Le poids de la machine chargée ne baisse donc que d’un quart environ, alors que le nombre de passages est doublé. Ceci peut, sur des sols gorgés d’eau, être aussi défavorable pour la formation d’ornières qu’un poids de charge élevé.

      Cependant, le débardage de charges partielles peut être une mesure efficace dans certaines situations lorsque l’humidité du sol augmente (arrivée de la pluie) et qu’une intervention de débardage doit encore être menée à son terme. Mais dès que l’humidité du sol se rapproche de la limite de liquidité, même un débardage à charge partielle provoque l’apparition d’ornières de type 3, et le travail devrait donc être arrêté.

      Il ne faut pas oublier de mentionner le fait qu’un débardage à charge partielle est sensiblement plus onéreux. Wöstefeld (2011) calcule pour les deux parcelles d’essai en Forêt-Noire une hausse des coûts de 30 % pour le débardage avec des porteurs.

      Bibliographie
      • Wöstefeld, J.H., 2011: Auswirkungen von Bändern und Teillasten auf die Erhaltung der technischen Befahrbarkeit von Rückegassen auf befahrungsempfindlichen Standorten. Masterarbeit, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg i.Br., 107 S.

       

      Traduction: TTN Translation Network